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Ô Richesses,
Aux Pauvresses

 Ô Richesses, Aux Pauvresses

Mais où donc la poésie va-t-elle se nicher ?

Ces deux lignes de quatre mots sont tout à la fois vraie publicité et ferme réclamation, contradiction dans les termes et détermination des contraires, expérience vécue et expression vivante, tradition et modernité, jeu de mots et syntaxe dialectique, contenu infini et forme brève.

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Analyse du texte

Les Richesses n'évoquent jamais que des choses, tandis que les Pauvresses sont des gens. Cela dit assez la contradiction du rapport où les travailleurs sont sans accès à la totalité des produits, car la force de travail engendre plus de valeurs que d'échanges permis. Mais ces termes qui se heurtent avec brutalité dans la vie, s'articulent et se meuvent ici dans la langue.

Au premier vers, l'interjection Ô est mobilisée à l'invocation des ressources naturelles auxquelles s'ajoutent les résultats accumulés du travail. À cette interjection est substituée, au second vers, la combinaison Aux (préposition-article défini) qui attribue ces richesses aux pauvresses.

La virgule qui ponctue le premier vers, distingue et exclut l'appartenance comme accomplie, d'une attribution revendiquée. L'absence de point final signifie que cet accomplissement reste du domaine de la pratique sociale. Si l'on songe que cette littérature ne signalerait l'accomplissement d'un tel effort historique que par la seule suppression de la virgule et la pose du point final, on mesure la distance du verbe à la réalité, de la coupe aux lèvres.

À l'image exacte de la supériorité des faits sur le texte et des actes sur la parole, une telle organisation du langage signifie bien plus que ce que l'on peut dire à son sujet, car elle a le désir d'être oracle et de prédire une réalité plus belle et plus consciente.

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Cette poésie brève, ni à courte vue ni à courte vie, a paru dans la revue Marginales n°299.

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Le commentaire suivant a été censuré par la rédaction un quart d'heure après avoir été mis en ligne.

 mais cette poésie semble indésirable - L'Echo 12 avril 2010

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